Découverte de la philosophie
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L'Inconscient et la Psychanalyse

Introduction

1. Théorie de FREUD

2.Théorie de JUNG

3. Informations pratiques

 

Introduction

L'Inconscient et la Psychanalyse

1. FREUD

Introduction

- Problématique

Nous venons de voir (cours sur la conscience) que l'homme considérait la conscience comme le centre essentiel de sa subjectivité, fondement de sa connaissance et de sa liberté. Mais si la conscience n'était qu'un effet de surface, dirigée à son insu par une énergie puissante et invisible, venant de nous-mêmes, d'une "région" ignorée de nous-mêmes ?

C'est ce que Freud affirme, à la fin du XIX° siècle. La découverte de l'inconscient ne ruine-t-elle pas la souveraineté de la conscience ? Si la conscience est parasitée à son insu, ne sommes-nous pas dépossédés de notre lucidité et de notre liberté ? Ne sommes-nous que des pantins illusionnés et conditionnés par toutes sortes de déterminismes ? Êtres de désirs et de passions, sans aucune maîtrise de nous-mêmes, ne sommes-nous pas condamnés à la fragilité et au malheur ? L'inconscient est-il inaccessible ou bien peut-on le comprendre ? Si nous arrivions à comprendre ses messages et par là en prendre conscience, pourrions-nous nous dégager de son emprise, voire le maîtriser ? Cependant rendre conscient l'inconscient, n'est-ce pas un paradoxe ? C'est ce pourtant ce à quoi nous convie Freud, à travers une méthode révolutionnaire : La psychanalyse.

Quels sont les enjeux de cette découverte ? Ils sont à a fois individuels et collectifs : réduire le pathologique et l'irrationnel dans notre existence, sortir de nos conflits internes et externes, de la maladie, de la névrose, des passions morbides et finalement de la violence, donc diminuer la souffrance, orienter l'humanité vers une santé psychique plus grande, lui apprendre à gérer ses désirs d'une manière plus équilibrée, aider l'être humain à être plus responsable, plus adulte, plus lucide, plus libre donc plus heureux.Enfin, réaliser les conditions d'un progrès réel, grâce à une harmonisation intérieure et extérieure. A-t-elle atteint déjà son but ?

- L'inconscient

En essayant de réfléchir sur l'HYSTERIE (voir plus loin), Freud découvre qu'il existe, dans notre psychisme, un "lieu" non spatial qu'il appelle une "instance psychique", où sont refoulés quantités de souvenirs - inaccessibles à la conscience - et que pour cette raison il appelle : l'INCONSCIENT.

Cette découverte est très importante, parce que loin d'être inerte et passif, l'inconscient fonctionne comme un pôle invisible immensément puissant et actif qui nous tire en arrière et nous infantilise. En effet, l'inconscient oriente nos désirs, nos choix, nos valeurs, il conditionne notre personnalité en fonction de notre passé le plus ancien, notre enfance. Il s'exprime à travers notre corps, nos gestes, nos paroles, nos fantasmes, nos rêves... d'une manière incompréhensible, "déguisée", qui nous paraît absurde et insensée. L'inconscient parasite le plus souvent notre liberté en se faisant prendre pour elle et en nous illusionnant sur elle. Enfin, il peut aller jusqu'à nous inhiber, partiellement ou totalement, dans nos comportements les plus habituels. Il fait de nous des être artificiels, aveugles, souffrants, des névrosés, des pervers, et quelquefois, tout à fait exceptionnellement, des génies...

La théorie de Freud est révolutionnaire. En effet, selon les philosophes occidentaux, en général, la conscience peut tout éclairer, pourvu qu'elle le veuille et l'être humain est libre. Leibniz, cependant admet des limites à cette lucidité et parle de "perceptions inconscientes" Schopenhauer pense qu'il existe "un vouloir vivre" inconscient, qui échappe à toute logique et à tout contrôle conscient. Nietzsche reprend ce thème. Mais, si le terme "inconscient" existe bien en philosophie c'est seulement comme adjectif. Il caractérise tout ce qui est en dehors de la conscience : la matière, l'animalité, la folie ou encore les états où la conscience fait défaut, l'évanouissement par exemple. Le terme INCONSCIENT comme substantif apparaît cependant en philosophie dans l'œuvre d'Eduard Von Hartmann, Philosophe et métaphysicien allemand, (1842-1906). À la fin du XIXe il popularise la notion d'inconscient dans les milieux intellectuels avant Freud et la psychanalyse. En 1869 il fait éditer en Allemagne la première édition de sa "Philosophie de l'inconscient". Le premier tome de l'ouvrage porte sur la "phénoménologie de l'inconscient". Mais c'est FREUD, qui donne à l'inconscient ses lettres de noblesse et sa définition spécifique.

FREUD entend par inconscient : "Le lieu psychique où sont refoulées les représentations (souvenirs, images, mots, signes, chiffres...) inaccessibles à la conscience"

La psychanalyse dès son origine se définit comme une théorie explicative du psychisme, une technique d'investigation des processus inconscients et enfin une thérapeutique, c'est-à-dire une technique qui permettrait la guérison des névroses par la PAROLE. Le psychanalyste, grâce à un travail sur lui-même, a appris à "entendre" la parole du patient. Son rôle consiste à la lui faire entendre à son tour. Et ce n'est pas facile parce que notre conscience est coupée de notre inconscient.

Le travail de l'analyse se fait avec les mots.

Apparemment la psychanalyse est plus proche de la médecine que de la philosophie. Alors pourquoi l'étudier dans le cadre du programme de philosophie ? Parce qu'en nous expliquant comment le psychisme fonctionne, Freud révolutionne l'idée que le sujet se faisait de sa propre conscience, de son "moi" et surtout le regard que l'on portait traditionnellement sur les grandes valeurs de la civilisation : la religion, l'art, la morale, la politique, la liberté. Dès sa naissance, la psychanalyse a fait scandale. Il n'empêche que Freud apporte des informations importantes sur ces grands thèmes que la philosophie s'appropriait autrefois et il est désormais impossible de ne pas tenir compte de son avis, même si cela déplaît fort à de nombreux philosophes contemporains.

ALAIN et SARTRE, pour ne citer qu'eux, nient en bloc la psychanalyse.

La psychanalyse a des implications philosophiques, bien qu'elle ne soit pas une philosophie, mais elle n'est pas non plus une science. Elle n'est ni mathématisable, ni "falsifiable"(cf. théorie de Popper). Nous analyserons dans le cours d'épistémologie, plus tard, à quelles conditions une théorie peut avoir le label "scientifique" ou non. Mais une théorie peut être vraie, utile ou intéressante sans avoir ce label.

On dit LA psychanalyse, mais en réalité, il existe aujourd'hui de nombreuses écoles correspondant à des divergences de théories et de courants. Commençons par l'analyse de la théorie de Freud ; nous verrons ensuite celles de ses successeurs et plus particulièrement celle de Jung.

- Vie de FREUD 1856-1939

1 - Né à Freiberg en Moravie en 1856. XIX° siècle : morale victorienne, pudibonde, répressive.

2 - Milieu bourgeois, parents commerçants aisés.

3 - Famille juive. Importance du père (loi du Père, Dieu le père), rituel de la circoncision (importance de la notion de "castration"). Figures bibliques Moïse... le monothéisme. Il se définit lui-même comme un "infidèle". Il n'est pas croyant, déteste les rituels. Il se situe dans le courant libéral issu de SPINOZA.

4 - Etudes littéraires classiques : modèles gréco-latins : Cf. Œdipe.

5 - Etudes de médecine, spécialité : neurologie. Démarche d'esprit scientifique. Docteur en médecine (1881). Stage à Paris chez CHARCOT, à Vienne chez BREUER, à Nancy chez BERNHEIM où il apprend la technique de l'hypnose.

6 – Il fait une série de conférences aux USA et déclare : "je vous apporte la peste".

7 - Fuit la montée du nazisme, part à Londres en 1938.

8 - Meurt à Londres en 1939 d'un cancer de la bouche - organe de la parole - lui qui a découvert que l'on pouvait sinon "guérir" du moins se dégager de ses troubles par la parole.

Théorie de FREUD

A. DECOUVERTE DE L'INCONSCIENT

A.1- L'OBSERVATION DE L'HYSTERIE

En stage à Vienne, chez le professeur BREUER, neurologue, spécialiste de l'hystérie - conflit psychique s'exprimant par des anesthésies, paralysies, cécité, contractures, des crises émotionnelles avec théâtralisme, des phobies - repérée depuis l'Antiquité et très mystérieuse, parce qu'on ne lui trouve aucune cause organique, Freud est chargé du cas d'Anna O. patiente hystérique. Elle présente des troubles moteurs graves : paralysie d'un bras et d'une jambe, avec anesthésie, une hydrophobie, des troubles de la vision. Elle a oublié tout un pan de son passé. Freud, qui avait étudié l'hypnose chez le Dr BERNHEIM à Nancy, décide d'essayer cette méthode, qui permet de remettre à jour les souvenirs oubliés. Sous hypnose, elle raconte ses souvenirs - Freud comprend qu'ils ont un rapport immédiat avec ses troubles - et, pendant son récit, ses troubles disparaissent provisoirement, pour réapparaître dès qu'elle n'est plus sous hypnose. Donc l'hypnose ne sert qu'à poser un diagnostic, elle ne guérit pas. Freud raconte ce cas dans son livre Cinq leçons sur la psychanalyse.

A.2 - MISE EN PLACE DES HYPOTHESES FREUDIENNES

1 - Le REFOULEMENT : les symptômes névrotiques sont "des résidus d'expériences émotives fortes" c'est-à-dire de traumatismes, qui, ayant été refoulés, produisent une "amnésie" (un oubli).

2 - La CONVERSION SOMATIQUE : ces traumatismes, oubliés, laissent des traces dans le corps, c'est ce que Freud nomme "symptômes somatiques", ce sont des "symboles commémoratifs", des "résidus mnésiques", qui se fixent dans le corps. Paradoxalement, la douleur du corps permet d'oublier, d'effacer, celle du psychisme quand elle est trop difficilement supportable.

3 - L'APPAREIL PSYCHIQUE : il existe un "clivage", (une séparation) entre le système conscient et le système Inconscient.

4 - La PAROLE a un effet cathartique, c'est-à-dire purificateur et libérateur. Elle est donc curative, cf. l'expression "talking cure" (cure par la parole).

A.3- EXPLICATION DES NEVROSES

La névrose est un trouble de la personnalité caractérisé par des conflits intrapsychiques inhibant les conduites sociales et le comportement du sujet en général, l'amenant à des conduites d'échec. Il se fabrique souvent un personnage, une personnalité artificielle, un "faux-self", pour se défendre et se protéger. La cause de toutes les névroses est le refoulement sexuel. (On dit : "étiologie sexuelle des névroses".) Le mot "sexuel" chez Freud déborde largement la génitalité. Il englobe toute l'affectivité depuis l'enfance et toutes les manifestations de plaisir. Freud emploie plutôt la notion de "libido".

Caractères de la névrose :

1 - Le sujet est conscient de ses troubles.

2 - Il est en état de souffrance.

3 - Il n'y a pas de cause physique expliquant son état. Ne pas confondre avec la psychose, voir tableau à la fin du cours.

Freud distingue quatre grands types de névroses.

A. La névrose d'angoisse. Troubles somatiques de toutes sortes et troubles psychologiques : anxiété paralysante, culpabilité, hypersomnie ou insomnie, sentiment d'infériorité, tristesse...

B. La névrose phobique. Terreur irrationnelle en face de certains objets ou de certaines situations : les lieux publics : agoraphobie, les animaux : zoophobie, l'enfermement : claustrophobie, le sang, le vide … etc.

C. La névrose obsessionnelle. Irruption violente morbide et involontaire dans la pensée de sentiments, d'idées, d'images, d'impulsions.... qui effraient et angoissent le sujet et sont en désaccord total avec sa morale et sa personnalité.

D. La névrose hystérique. Troubles physiques : asthénie, douleurs, accidents de "conversion somatique", cécité, surdité, mutisme, paralysie.... sans aucune lésion organique. Troubles psychologiques : puérilité, fantasmes de séduction, mythomanie, frigidité ou impuissance..... Tous les troubles sont théâtralisés.

Il existe beaucoup d'autres névroses qui sont des mélanges des caractères de ces quatre principales névroses. Pour Freud, la cause de toutes les névroses est le refoulement sexuel. Ce sera la raison principale de son différend avec Jung.

A.4-EXPLICATION DU PSYCHISME (ou "appareil psychique")

La vie, dès le départ, est un nœud de conflits permanents. Chaque individu, dès sa toute petite enfance, cherche son plaisir, mais il se heurte nécessairement aux dures lois du réel et à celles de la société, en particulier à l'interdit de l'inceste. Ces lois, transmises par ses parents, freinent, contrarient, empêchent, perturbent, sa satisfaction, voire lui infligent des déplaisirs (c'est-à-dire toutes sortes de souffrances). Un mécanisme automatique, involontaire et non-conscient, lié au système nerveux "protège" le sujet en "nettoyant" sa conscience. Il retire les souvenirs liés aux expériences pénibles pour les ranger dans le psychisme, selon un ordre qui nous paraît tout à fait illogique. Nos souvenirs, en effet, semblent parfois dériver de manière chaotique. Ce même mécanisme envoie les souvenirs dans un "lieu" non matériel, bien caché et cela produit un oubli apparent grâce auquel le sujet peut continuer à vivre au présent sans parasitage. En réalité, le corps garde les engrammes, (les traces ou la "mémoire") des affects, c'est à dire des sensations physiques de plaisir et de douleur, qu'il a vécus. Et le psychisme enregistre et garde en mémoire le souvenir de tous les détails qui accompagnaient ces affects, dans une "région" (non spatiale) où la conscience n'a absolument pas accès : l'INCONSCIENT.

Les remémorations (ou anamnèses) que Freud a opérées sous hypnose prouvent que RIEN N'EST OUBLIÉ. Tout ce que nous croyons avoir oublié existe là, dans ce sous-sol de la mémoire, lieu du refoulé. Mais, d'une part, entre ces souvenirs, parfois éloignés les uns des autres dans le temps ou sans rapport apparent entre eux, il se produit des associations étranges. Et, d'autre part, ces chaînes d'associations, inconnues de nous, ont le pouvoir de réactiver des affects c'est-à-dire de déclencher des réactions engrammées (inscrites mais oubliées) dans le corps. Toutes ces chaînes de souvenirs sont constamment dynamisées par les expériences de notre vie quotidienne. De sorte qu'il se produit des courts circuits, des explosions, des déraillements à l'intérieur de nous-mêmes. Ainsi, la perception d'une image ou d'une scène, à l'extérieur, renvoie par des détours absolument imprévisibles, au souvenir de la même image ou de la même scène et à toutes les images qui se sont "collées" à elle. Tout cela réactive dans le corps les affects connectés à ces souvenirs. Ce qui explique qu'un simple bruit ou une odeur puisse déclencher en nous un plaisir ou une angoisse incompréhensibles.

Attention : Freud situe les affects dans le corps, et les représentations dans l'inconscient. Mémoire du corps (affect) et mémoire du psychisme (inconscient), sont interconnectées.

Csq 1. La personnalité que nous construisons est directement liée avec tout le contenu de ce que nous avons refoulé, mais sur le mode de l'opposition. C'est à dire que notre moi apparent est, en partie, la figure inversée de notre moi inconscient (ou invisible). Il est le résultat de toute une stratégie inconsciente et involontaire de compensations, de déguisements qui peut dans de nombreux cas aboutir à l'élaboration d'un faux-self c'est-à-dire à une personnalité "toc" très artificielle, fabriquée uniquement sur le mode défensif. Finalement, nous sommes tous à l'image du YIN et du YANG que nous avons étudiés il y a peu de temps. Nos qualités sont l'envers des défauts que nous nous cachons... et inversement !

Csq 2. L'autre est en nous. Cet univers du refoulé s'élabore lentement, solidement, avec toutes ses ramifications souterraines. C'est un vrai labyrinthe ténébreux, il fait partie de nous-mêmes, il contient tout ce que nous n'avons pas pu ou voulu supporter ou voir, il est notre pôle d'ombre, notre moi intérieur caché et paradoxalement, il nous est étranger. Et du coup, cet autre que nous ne pouvons pas reconnaître à l'intérieur de nous, nous le reconnaissons à l'extérieur de nous. C'est sur la figure de l'étranger que nous "projetons" nos propres contenus inconscients négatifs que nous refusons et détestons. Le refus de l'autre exprime la peur et le refus de cette altérité qui est en nous. Les défauts que nous détestons le plus chez nos ennemis sont justement ceux que nous nous masquons le plus et que nous compensons par une conduite d'évitement. Ce qui nous choque et nous dérange le plus chez les autres : l'hypocrisie, la vulgarité, la tyrannie, la saleté... est toujours le reflet de notre moi caché. Attention à nos jugements, ils nous jugent, ils permettent de nous juger.

Csq 3. L'inconscient TRAVAILLE et s'EXPRIME. Les souvenirs refoulés ne restent pas là, inertes empilés comme des photos. Ils sont décomposés en petits "morceaux", images, mots, lettres, chiffres, sons, couleurs, en éléments simples et tous ces éléments sont réorganisés autrement, par un TRAVAIL DE L'INCONSCIENT, à l'aide d'un CODE très spécial, un peu comme des rébus, et manifestés c'est à dire réexpédiés à l'attention du sujet, à sa conscience, grâce à un langage spécial : le LANGAGE de l'INCONSCIENT. En proposant un décodage ou décryptage de ce langage, Freud donne un sens à ce qui paraissait insensé.

A.5 -Le TRAVAIL DE L'INCONSCIENT

Dans son fonctionnement, l'inconscient obéit au PROCESSUS PRIMAIRE

1 - Négation du principe de réalité, de la morale, de la logique, du temps. Il tisse entre les représentations, des relations de ressemblances, d'oppositions ou encore, il condense en une seule image une multiplicité de significations sans respecter les lois du réel, ni celles de la morale, ni celles de la logique, ni enfin celles de la chronologie. Il est donc irréel, amoral, irrationnel, atemporel. Une pierre peut s'envoler. Tous les désirs interdits peuvent s'accomplir. Des objets coexistent ou s'engendrent d'une manière magique, pas de causalité ou de contradiction. Charlemagne, enfant, peut se promener avec le rêveur...

2 - L'inconscient ne cesse de jongler avec les représentations, d'une manière purement ludique. Il "travaille" par DEPLACEMENT et CONDENSATION. Il fait des calembours, des rébus, des jeux de mots, il utilise toutes sortes de figures de rhétorique, métaphores, métonymie, synecdoque … etc.

3 - Il n'obéit qu'au " PRINCIPE DE PLAISIR ".

Le système conscient, contrairement à l'inconscient, respecte le principe de réalité, la morale, la logique et la chronologie. On dit qu'elle suit le PROCESSUS SECONDAIRE.

A.6 - Le LANGAGE DE L'INCONSCIENT

L'inconscient se manifeste à l'aide de codes particuliers.

a) Le symptôme somatique (Langage du corps). Des souffrances s'inscrivent dans le corps, (mal au dos, à la tête, au ventre, au cœur...), elles traduisent un conflit psychique. Elles sont une sorte "d'écriture" ou de traduction du psychisme dans le corps. Les soucis, les angoisses que l'on cherche, consciemment ou non à oublier, se matérialisent dans un endroit du corps qui a un rapport symbolique avec eux ; par exemple une migraine se déclenche avant un examen, un lumbago au moment d'une tâche trop pénible...

b) L'acte manqué : réalisation d'un geste ou d'une action non conforme à la volonté du sujet, ou à son projet conscient. Renverser son verre sur la robe de sa voisine, oublier son passeport alors que l'on doit partir pour deux mois en Amérique, rater son train ... (Cf. étude en classe de l'acte manqué de Freud à Rotterdam. Il manque le train qui devait le conduire à Londres chez son frère pour réaliser son désir d'aller visiter le musée).

c) Le lapsus. C'est le fait, involontaire, de dire un mot à la place d'un autre. Dans Psychopathologie de la vie quotidienne, Freud analyse l'un de ses lapsus. Pendant un voyage en train, lors d'une conversation avec un voisin, il veut parler d'un peintre, Signorelli, auteur d'un tableau qu'il vient de voir dans la cathédrale d'Orvietto en Italie et qui représente le Jugement Dernier. Mais il fait un double lapsus et dit "Botticelli", puis "Boltrafio", à la place du nom qu'il cherche. Rentré chez lui, il analyse la surdétermination de la syllabe "BO". Synthèse de l'interprétation de Freud : il se rappelle qu'au moment où le train traversait la Bosnie-Herzégovine, il a pensé que dans ce pays, des Turcs préféraient se suicider plutôt que d'être impuissants. Mais, par politesse, il n'a pas communiqué cette pensée à son compagnon de voyage. Il a donc refoulé l'association mort/impuissance. Un peu plus tard, il retrouve la fiche d'un de ses anciens patients, habitant à Traffoï. Il se souvient alors que cet homme avait préféré se suicider plutôt que de vivre son impuissance. C'est ce drame - mort/impuissance - que Freud a oublié donc refoulé, parce que vécu comme un échec personnel. Ce patient signifiait par ce geste qu'il ne faisait aucune confiance à la psychanalyse que Freud commençait à mettre en pratique. Le lapsus "Boltrafio" une fois décodé lui parle : "Bosnie" le renvoie à "Traffoï" où le même type de drame le renvoie lui-même à sa propre castration (impuissance).

d) Le rêve. Autrefois, le rêve était considéré soit comme un message divin, soit vers le XVII°, comme une divagation de "la folle du logis" c'est-à-dire de l'imagination. Pour Freud, le rêve est une manifestation de l'INCONSCIENT.Il existe différents types de rêves, certains sont le résultat de "restes diurnes" : ils sont simples et expriment clairement des désirs qui n'ont pas été satisfaits dans la journée qui précède. Ceux qui intéressent Freud ont généralement un aspect absurde et incohérent. Ils se produisent durant le sommeil paradoxal. (cf. cours d'Anthropologie : 1ère phase : sommeil "aveugle" / 2ème phase: sommeil "sourd" / 3ème phase : sommeil "paralysé" / 4ème phase: le sommeil paradoxal (ph.1 + ph.2 + ph.3) + éveil de la CS.)

Le rêve est un scénario d'images, couleurs, formes, sons, mots, chiffres..., non logique, produit par le désir.

"Le rêve est la voie royale de l'inconscient" Freud.

Il est une mise en scène du fantasme. Le FANTASME est : "Un scénario imaginaire où le sujet est présent et qui figure de manière plus ou moins déformée par les processus défensifs, l'accomplissement d'un désir inconscient. Le fantasme peut être exprimé dans le rêve ou d'une manière consciente". Freud.

Le CONTENU MANIFESTE DU REVE

C'est le rêve tel que l'on s'en souvient et qu'on le raconte. (Exemple, le récit de l "homme aux loups").

Le CONTENU LATENT DU REVE

C'est l'ensemble des informations non présentes immédiatement à l'esprit, mais qui sous-tendent le rêve et qui expliquent sa fabrication. Le rêveur peut grâce aux "associations libres" retrouver les chaînes d'associations, de liaisons, qui le conduisent à des souvenirs imprévus, d'êtres, de symboles, d'émotions. Il découvre que chaque élément du rêve est un concentré d'expériences passées, qui ont entre elles des relations de ressemblances ou d'oppositions. L'association libre permet de glisser le long de ces circuits que le rêve vient d'emprunter, d'en saisir le feuilleté, les strates et toute la complexité. Elle fait surgir des pans entiers d'un passé enfoui lointain, que l'on croyait complètement anéanti, avec tout le cortège d'émotions qui leur étaient liées et qui se revivent alors comme si elles étaient toutes fraîches, c'est-à-dire dans la même intensité vivante qu'au moment où elles étaient vécues. Le rêve utilise plusieurs types de symboles.

- d'abord des symboles PHYLOGENETIQUES, c'est-à-dire universels. Ils concernent à peu près 20% du matériel du rêve selon Freud. Par exemple les symboles masculins sont tous les objets de forme allongée, qui peuvent aller du pouce à l'obélisque, en passant par les objets tranchants comme le poignard ou l'épée. Les symboles féminins, tous les objets creux qui peuvent aller de la bourse à la caverne. Il convient alors de différencier les symboles féminins des symboles maternels. Les symboles de naissance : tunnels etc.

- ensuite les symboles ONTOGENETIQUES, 80% selon Freud, c'est-à-dire liés à l'histoire personnelle du sujet.

Exemple de rêve à interpréter en classe : L'HOMME AUX LOUPS. (In Cinq Psychanalyses. Freud.) C'est un homme qui parle:

"J'ai rêvé qu'il faisait nuit et que j'étais couché dans mon lit (....) Tout à coup, la fenêtre s'ouvre d'elle-même, et à ma grande terreur, je vois que sur le grand noyer en face de la fenêtre, plusieurs loups blancs sont assis. Il y en avait 6 ou 7. Les loups étaient tout blancs et ressemblaient plutôt à des renards ou à des chiens de bergers car ils avaient de grandes queues comme les renards, et leurs oreilles étaient dressées comme chez les chiens quand ceux-ci sont attentifs à quelque chose. En proie à une grande terreur, évidemment d'être mangé par les loups, je criai et m'éveillai. " Ma bonne accourut auprès de mon lit afin de voir ce qui m'était arrivé. Il me fallut un bon moment pour être convaincu que ce n'avait été qu'un rêve, tant m'avait semblé vivant et clair le tableau de la fenêtre s'ouvrant et des loups assis sur l'arbre, (...) Les loups étaient assis tout à fait tranquilles (...) et me regardaient. On aurait dit qu'ils avaient toute leur attention fixée sur moi. Je crois que ce fut là mon premier rêve d'angoisse. J'avais tout au plus cinq ans."

INTERPRETATION DU REVE. Exercice oral en classe.Les signifiants retenus par Freud : Loups, blancs, arbre, 6 ou 7, queues, oreilles dressées, regardaient, fixée, me (moi).

Dessin du rêveur :



A.7 - Les "Topiques freudiennes" ou L'architecture du système psychique

A. LA PREMIERE "TOPIQUE".

Avant 1920, c'est à elle que Freud se réfère dans tous ses écrits.On appelle "topique" une théorie qui suppose une différenciation de l'appareil psychique en un certain nombre de systèmes ou fonctions différentes et disposés dans un certain ordre les uns par rapport aux autres. Cette théorie permet de les considérer métaphoriquement comme des "lieux" psychiques, donc de les représenter à l'aide de schémas bien qu'ils ne soient pas spatiaux.

Cette première vision schématique de l'appareil psychique comprend trois instances :

1 - le système conscient. Présence au monde, vigilance, permet au sujet de percevoir le monde réel, mais aussi d'aller se "promener" dans le préconscient et d'y retrouver toute une série de souvenirs accessibles.

2 - le système préconscient. "Région" du psychisme qui contient la mémoire normale, c'est-à-dire tous les souvenirs que l'on peut rappeler à la conscience.

La censure les sépare (le système conscient et le système préconscient) du système inconscient, elle a mémorisé tous les interdits et les tabous. Elle est comme un cordon de CRS qui bloque le passage des représentations de la conscience vers l'inconscient et leur passage de l'inconscient vers la conscience, sauf si la censure ne les reconnaît pas, si elles sont "déguisées" par exemple. D'où le langage codé de l'inconscient.

3 - le système inconscient. Il contient toutes les représentations refoulées, c'est-à-dire oubliées. Il est constitué d'un noyau pathogène, nœud des souvenirs refoulés les plus anciens, qui conditionne les autres refoulements en attirant les représentations qui ont un lien de ressemblance avec lui. Freud appelle sens "progrédient" ce mouvement d'attirance vers le "fond" et sens "régrédient" le mouvement inverse, par lequel les souvenirs refoulés cherchent à revenir à la surface. Freud reconnaît l'existence d un inconscient collectif mais qu'il n'a pas exploré.

B. LA DEUXIEME TOPIQUE

Après 1920 Freud modifie son schéma de l'appareil psychique, il lui donne une bien plus grande extension, de nouveaux contenus à la censure qu'il appelle "Surmoi " et il ajoute un pôle pulsionnel qui n'existait pas dans la 1ère topique.

Les trois nouvelles instances sont les suivantes :

1 - Le Ça. C'est le pôle pulsionnel biologique. Il contient les pulsions Éros et Thanatos, pulsion de vie et pulsion de mort, tout ce que l'être apporte en naissant, l'inné, le somatique, l'animalité (bien que la pulsion ne soit pas un instinct nous l'avons vu plus haut). Le Ça est naturel, collectif, universel.

2 - Le Surmoi est beaucoup plus vaste et "enrobant" que la censure de la 1ère topique. Il est non seulement l'intériorisation des interdits et des tabous de la société et de nos éducateurs, mais encore, l'intériorisation de toutes leurs exigences. Il contient donc tous les modèles sur lesquels nous devons modeler notre personnalité le moi idéal et toutes les valeurs vraies ou artificielles qui nous ont été inculquées : l'idéal du moi. Le Surmoi est en partie conscient et en partie inconscient. Il nous entoure et nous traverse intérieurement. Il est redoutable parce qu'il est transgénérationnel, il contient et transmet de générations en générations toutes les inhibitions de nos ancêtres, c'est-à-dire leurs névroses. Les psychanalystes constatent qu'une névrose peut se transmettre d'une génération à l'autre pendant des siècles.

3 - le Moi. Le "pauvre moi" est coincé entre le Ça et le Surmoi qui sont "plus forts que lui", et il souffre beaucoup de cette double oppression par ses "tyrans". Freud dit que le "moi" est "une fraction du Ça qui a été modifiée au contact du réel et du Surmoi". Il est l'individu. Par rapport à la 1ère topique, il est constitué du conscient, du préconscient - sa mémoire personnelle - et d'une partie de son inconscient - son refoulé personnel -, celle que Freud n'a pas déplacée dans le "Surmoi". La force ou puissance du "Surmoi" varie d'un individu à un autre. On nomme "surmoïque" un individu dont le Surmoi est particulièrement dominant. Sans "Surmoi" un individu n'est pas intégrable dans la société. Cf le film Vol au-dessus d'un nid de coucous.

" Un adage nous déconseille de servir deux maîtres à la fois. Pour le pauvre moi la chose est bien pire, il a à servir trois maîtres sévères et s'efforce de mettre de l'harmonie dans leurs exigences. Celles-ci sont toujours contradictoires et il paraît souvent impossible de les concilier ; rien d'étonnant dès lors à ce que souvent le moi échoue dans sa mission. Les trois despotes sont le monde extérieur, le Surmoi, et le ça. Quand on observe les efforts que tente le moi pour se montrer équitable envers les trois à la fois, ou plutôt pour leur obéir, on ne regrette plus d'avoir personnifié le moi, de lui avoir donné une existence propre. Il se sent comprimé de trois côtés, menacé de trois périls différents auxquels il réagit, en cas de détresse, par la production d'angoisse ". Freud.

A.8. THEORIE DES PULSIONS

Tout d'abord, Freud explique que dans notre corps, nous sommes animés par des PULSIONS. Celles-ci ont une origine naturelle, biologique, elles proviennent du "ça".

1. DEFINITION. - LA PULSION est une force qui vient de l'intérieur. Elle est comme un moteur. Son réglage se fait automatiquement par l'appareil nerveux. Elle est source de tout dynamisme. Elle se distingue de l'excitation, qui elle vient d'une source extérieure et à laquelle on peut échapper par une action musculaire.

2. CARACTERES de la pulsion

La pulsion a 4 caractères :

a) elle est active.

b) son but est la satisfaction, c'est-à-dire la suppression d'elle-même, la conséquence en est le PLAISIR.

c) son objet est VARIABLE, l'objet est ce par quoi la pulsion peut se satisfaire.

d) la source de la pulsion est de nature BIOCHIMIQUE.

3. POLARITES de la pulsion.

Les pulsions s'organisent autour de trois polarités (= 6 pôles) :

1 - La polarité "réelle". Celle-ci implique un sujet et un objet, c'est-à-dire un être ou objet extérieur au sujet.

2 - La polarité "économique". C'est-à-dire ce que l'on gagne (ou perd) en matière de plaisir et de douleur, une sorte de bénéfice ou de perte.

3 - La polarité "biologique" : le fait d'être actif ou passif.Nous verrons plus tard comment la pulsion s'organise à travers ces polarités, pour être NORMALE, et comment elle peut devenir anormale ou PERVERSE.

4. LES DIFFERENTES PULSIONS

Avant 1920, Freud suppose l'existence de deux Pulsions :

a) Pulsion de conservation du moi, se nourrir, se défendre.

b) Pulsion de conservation de l'espèce, se reproduire. Il faut tenir compte de cette première distinction, parce que c'est celle que Freud utilise dans la majeure partie de son œuvre, qui se situe avant 1920.

Après 1920, sa théorie se précise, et il renonce à ces deux pulsions pour les remplacer par :

1 - La pulsion de VIE : EROS : une force qui pousse à procréer ou à créer, c'est-à-dire à unir, lier, instituer, complexifier des unités toujours plus grandes, en définitive à aimer et à faire exister.

2 - La pulsion de MORT : THANATOS : la force qui est le contraire de la précédente et qui pousse à détruire ou à tuer, tout ce qui existe, c'est-à-dire à séparer, dissoudre, simplifier, réduire ce qui est assemblé. Elle se présente sous 2 aspects :

a - L'agression : attaquer et anéantir ce qui est à l'extérieur de soi ou soi même.

b - La régression : s'éloigner soi-même de tout ce qui représente la vie, se retirer dans un état inorganique, loin des tensions de la vie et rechercher l'ATARAXIE (sérénité dans un détachement total). Freud appelle PRINCIPE DU NIRVANA, cette quête du calme absolu que l'on peut trouver dans le bouddhisme ou dans le désir philosophique de la sagesse et il l'apparente à la pulsion de mort.Il existe un "étayage des pulsions", c'est-à-dire plusieurs sortes de mélanges ou combinaisons des pulsions entre elles. Chaque pulsion est rarement pure au sens chimique. Par exemple, chez le violeur, EROS et THANATOS sont liées.

5. Les 4 principes qui règlent la circulation des pulsions Selon Freud le système nerveux gère automatiquement les pulsions selon 4 principes.

1Le PRINCIPE DE CONSTANCE. C'est la tendance de l'appareil psychique à maintenir l'intensité de la pulsion au niveau le plus bas possible.

2Le PRINCIPE DE PLAISIR-DEPLAISIR. L'affirmation que toute conduite a tendance à fuir un état pénible et à tendre vers un état agréable.

3Le PRINCIPE DE RÉALITÉ. L'appareil psychique tient compte des réalités concrètes du monde extérieur et s'y accommode à travers des conduites de détour qui peuvent être douloureuses pour atteindre son but final : le plaisir.

4 La COMPULSION DE REPETITION. Principe selon lequel les expériences fortes (agréables ou désagréables) sont récurrentes (se répètent, reviennent régulièrement dans le psychisme.) Cette compulsion nie en partie le principe de PLAISIR-DEPLAISIR puisqu'elle concerne aussi les expériences douloureuses.

6. ÉVOLUTION DE LA PULSION SEXUELLE OU LIBIDO. (Théorie des différents stades de maturation)

LA LIBIDO : Freud appelle libido la sexualité. Mais il donne à ce terme un sens beaucoup plus large que celui que l'on entend habituellement. La Libido, c'est l'ensemble des pulsions qui conduisent au plaisir. Or la libido apparaît dès la petite enfance. En affirmant l'existence d'une "sexualité infantile" Freud a fait scandale à son époque. L'enfant, en fonction de son âge "apprend" à expérimenter divers types de plaisirs (polymorphisme), sa libido mûrit et évolue en passant par différents stades.

I - stade FŒTAL. Selon Freud, le fœtus, dans sa position confortable et protégée, ressent du plaisir. C'est ce plaisir qu'il recherchera plus tard lors de régressions particulières si la vie le blesse trop.

II - stade ORAL. (0 à 1 an à peu près). Plaisir oral (de la bouche) dans l'acte de téter. Ce plaisir est passif, il érogènise la bouche. Érogèniser, c'est rendre une zone du corps sensible au plaisir.

III - stade ANAL. (1 à 2 ans à peu près). Durant l'éducation à la propreté, l'enfant apprend à maîtriser ses sphincters, c'est-à-dire à "donner" ou à "retenir" ses excréments. Pour la première fois, il fait l'expérience d'une relation à l'autre où il est actif et volontaire : où il a le pouvoir "d'offrir" ou de "refuser" ce qu'on lui demande et par conséquent de "faire plaisir" ou de "d'emmerder" la personne qui s'occupe de lui. Freud situe à ce moment-là l'origine de traits de caractère tels que ceux de l'avarice, du sadisme ou de la passion pour l'ordre et la propreté.

IV - stade GENITAL ou PHALLIQUE. (Entre 2 et 4 ans environ). Le phallus est le symbole du sexe masculin. L'enfant découvre son sexe et le plaisir de jouer avec. C'est là que se noue le complexe d'Œdipe dont nous parlerons plus loin.

V - période de LATENCE. L'enfant s'intéresse à toutes sortes de jeux et d'activités sans rapport direct, apparent, avec la sexualité.

VI - stade de la PUBERTÉ. Réactivation puissante du stade génital sous la poussée hormonale. Mais ces désirs se heurtent à des interdits.

7. LES COMPLEXES : manière conflictuelle dont les pulsions s'organisent, se nouent, dans leurs contacts avec la société. Ce sont des troubles normaux et universels d'après FREUD.

1 - Le COMPLEXE D'OEDIPE. Dans la tragédie d'Œdipe, Freud voit un modèle parfait de l'attirance que vit normalement tout enfant pour le parent de sexe opposé et de son agressivité à l'encontre du parent de même sexe. Si c'est l'inverse, alors on parle "d'Œdipe inversé". Lire Œdipe Roi et Œdipe à Colone de SOPHOCLE. Freud donne à ce mythe une importance capitale en psychanalyse. Il affirme qu'elle est l'histoire symbolique cachée de chacun d'entre nous et que c'est la raison pour laquelle elle nous touche si fort. (Pour les femmes le schéma est inversé et plus compliqué.)Il faut donc lire ce texte à deux niveaux : au niveau 1 : littéral et au niveau 2 : psychanalytique. Au niveau 2, Œdipe représente le névrosé, ses enfants sont ses énergies, son royaume est son moi. Les fléaux sont ses symptômes, ses actes manqués, ses échecs. Ses deux pères représentent les deux aspects différents de son père : 1) le père social, le roi de Thèbes et le mari de sa mère, 2) le père nourricier; le berger qui l'a élevé. Son aveuglement représente la cécité psychique propre à tous les névrosés. Tirésias, le psychanalyste idéal puisqu'il "sait" de l'intérieur ce qu'est la sexualité masculine et la sexualité féminine, alors que jamais un sexe ne peut connaître le vécu réel de l'autre sexe.

LE MYTHE D'OEDIPE. En voici le récit : Laïos, et Jocaste, roi et reine de Thèbes (Grèce) vont consulter la PYTHIE à l'oracle de Delphes. Celle-ci leur annonce qu'ils vont avoir un fils, qui tuera son père et épousera sa mère. Le parricide et l'inceste sont deux crimes impardonnables en Grèce. Donc les parents, sitôt l'enfant né, ordonnent à un serviteur de l'emporter dans une forêt et de le tuer. Le serviteur ne tue pas l'enfant, mais le pend à une branche d'arbre à l'aide d'une courroie qui lui traverse le pied. Il est trouvé, sauvé et élevé par un berger, qui le nomme "Œdipe", en raison de son pied qui est resté enflé. (ode = enflé. Pes = pied). Il a donc deux pères : un père social et un père nourricier. Devenu jeune homme, il consulte le même oracle à Delphes. Il obtient la même réponse, qui lui paraît à lui aussi, insupportable. IL NE VEUT PAS de ce destin. IL DIT NON. Et il fuit vers la ville pour échapper à son destin. Mais il ne sait pas qu'en disant NON, à son insu, il dit OUI, et fonce tête baissée vers la réalisation de son destin. Il arrive à Thèbes qui vit une réelle tragédie. En effet, un monstre, le SPHINX (monstre, corps de lion, ailes et visage de femme, certains l'appellent "SPHINGE", pose toujours la même question aux jeunes gens : "Qu'est-ce qui marche à quatre pattes le matin, à deux pattes à midi et à trois pattes le soir ?" Le sphinx dévore ceux qui ne trouvent pas la réponse et la ville est bientôt décimée de sa jeunesse. Œdipe, en état de crise, décide d'aller braver le sphinx. En route, il croise un homme qui refuse de lui laisser la "priorité". Après une brève altercation, Œdipe tue cet homme qu'il ne connaît pas et qui justement est son père ! Il arrive près du monstre et répond facilement à ses questions : C'est l'homme. Le matin, enfant, il marche à 4 pattes. A midi, adulte, il marche sur ses 2 jambes. Enfin, au soir de sa vie, vieillard, il a besoin d'une canne. Dépité d'avoir perdu, le monstre se jette dans le précipice et se tue. La ville est enfin libérée. Œdipe rentre victorieux à Thèbes. Pour récompenser le héros, la reine lui propose de l'épouser. Sophocle lui fait dire "Puisses-tu O Œdipe ne jamais savoir qui tu es !" (Donc, Jocaste sait !). Œdipe devient roi. Il a quatre enfants : deux fils Etéocle et Polynice et deux filles Antigone et Ismène, qui ont la particularité d'être en même temps ses frères et sœurs.

Des fléaux accablent alors la ville. Œdipe consulte le célèbre devin TIRESIAS. TIRESIAS a un destin bien particulier. D'abord homme, il se marie et a des enfants. Un jour, voyant deux serpents accouplés, il les sépare avec un bâton. Il se retrouve subitement transformé en femme. Il vit alors pendant 7 ans une vraie vie de femme. Il se marie et a des enfants. Il se promène, voit à nouveau deux serpents accouplés et les sépare avec un bâton. Il se retrouve vieillard. Il est le seul personnage de la mythologie grecque à avoir vécu de l'intérieur le statut masculin et le statut féminin. Donc il "sait" la nature de la différence sexuelle. C'est pourquoi, Zeus et Héra, qui se disputaient pour savoir qui de l'homme ou de la femme avait le plus de plaisir dans l'acte sexuel, trouvent en lui l'interlocuteur idéal. A leur question, il répond : "Si le plaisir est 10, l'homme a 1, la femme 9." Héra, furieuse que son secret soit dévoilé, le rend aveugle. Zeus, pour atténuer la punition de sa femme, lui donne le don de voyance. AVEUGLE / VOYANT. Il ne voit plus les objets matériels dans l'espace, mais il voit à travers l'esprit et à travers le temps.C'est donc Tirésias que choisit Œdipe pour lui expliquer la raison de ces désastres. Quelqu'un a dû commettre une très grave faute dans son royaume. Il veut savoir qui et quelle faute, pour le punir, l'exiler et délivrer son royaume des calamités qui le ruinent. Lors de leurs entretiens, à plusieurs reprises, Tirésias tente de lui faire comprendre qu'il est lui-même le coupable qu'il cherche, en lui racontant avec précision les détails de sa propre vie, celle d'Œdipe bien entendu, et qu'Œdipe devrait reconnaître immédiatement. Mais Œdipe ne comprend RIEN, absolument rien. Comme tout névrosé, il est aveugle en ce qui le concerne. Il n'entend pas qu'il est question de lui. Finalement, il menace Tirésias de le tuer s'il ne lui donne pas le nom du coupable. Alors Tirésias, à regret, lui dit : "C'est toi ". Désespéré, Œdipe se crève les yeux, traduisant son impossibilité et son refus de voir sa vérité, se recouvre de cendres (rituel funéraire) et s'exile lui-même. Lorsque Jocaste, (sa mère et sa femme), apprend la nouvelle, elle se pend. Antigone, sa fille, décide d'accompagner son père dans son exil. Le roi parti et la reine morte, Créon, le frère de la reine, prend le pouvoir et décide de régner avec chaque frère en alternance. Il commence par partager le pouvoir avec Etéocle. Mais Polynice fomente une rébellion et au cours d'un combat, les deux frères s'entre-tuent. Créon organise des funérailles officielles pour Etéocle et ordonne de jeter aux vautours le corps de Polynice le rebelle, avec interdiction de lui donner une sépulture, sous peine d'être enterré vivant. C'est à ce moment qu'Antigone revient à Thèbes, après la mort de son père, bravant l'interdit de son oncle et les gardes qu'il a fait placer, elle va "enterrer" Polynice, (le rituel grec demande que l'on jette seulement une poignée de terre sur le cadavre). Au moment où Antigone accomplit ce geste les gardes l'arrêtent et l'enterrent vivante. Quant à Ismène, elle est assassinée en se rendant à un rendez-vous amoureux avec un ami de son frère, par un ami de son autre frère (ils étaient ennemis).

2 - LE COMPLEXE DE CASTRATION

a - Chez l'homme Freud affirme que les hommes ont tous peur de la castration (acte de couper le sexe masculin) à cause d'une menace paternelle liée à une culpabilité et qu'ils expliquent la différence des sexes par un retranchement du pénis chez la fille. Donc, voir un sexe de femme les renvoie à une terreur sourde, celle d'une castration possible puisque réellement constatée. Ce fantasme serait commun à tous les hommes. Du coup, cette peur constante conduit les hommes à se construire des systèmes de défense et une personnalité qui protège leur virilité à travers le pouvoir.

b - Chez la femme Freud affirme que les femmes perçoivent l'absence de pénis comme un préjudice qu'elles cherchent à nier ou à compenser ou à réparer, à travers toutes sortes de prises de pouvoir, en particulier sur leurs maris et surtout sur leurs fils. C'est le thème de la "mère phallique" ou de la "mère castratrice".C'est peut-être la raison qui explique la réponse de Freud à une femme qui lui demandait comment bien éduquer son fils :

" Madame, quoique vous fassiez, ce sera mal. "

Différentes interprétations possibles :

a. Les femmes sont incapables d'élever leurs fils, d'en faire de vrais hommes.

b. Si on élève un enfant en respectant ses désirs et son individualité, il sera mal adapté aux règles de la société.

c. Si on élève un enfant selon les règles strictes de la société, en le formatant, il sera névrosé et ne sera pas heureux.

8. LES DEVIATIONS OU PERVERSIONS

Aucun jugement moral chez Freud, ce ne sont que des diagnostics, alors que la société les sanctionne pénalement.

a – Le POLYMORPHISME DE LA LIBIDO.

Lorsque Freud affirme que "L'enfant est un pervers polymorphe", il veut dire par-là que n'importe quelle zone du corps peut devenir érogène. Le "montage" de la sexualité commence très tôt. Il n'est pas stéréotypé, ni fixé à la naissance. L'être humain n'a pas d'instincts qui lui donneraient d'emblée un "programme sexuel" comme chez les animaux. Il a des pulsions qui diffèrent de l'instinct par leur souplesse d'adaptation. Elles se satisfont de manières infiniment variées à travers les âges, les civilisations et les individus. La sexualité de l'enfant se constitue peu à peu au cours de son histoire personnelle et peut parfois prendre des formes perverses ou atypiques.

b - La NORME.

Si la perversion est une déviation par rapport à la NORME, encore faut-il préciser celle-ci. Une conduite normale est celle que suit le plus grand nombre d'individus. La norme dans nos sociétés :

- Polarité n°1 "réelle" (sujet / objet) : hétérosexualité, l'objet est un autre être, de sexe différent, adulte, humain, vivant.

- Polarité n°2 "économique" (plaisir/ déplaisir) : Les deux cherchent ensemble à atteindre leur plaisir.

- Polarité n°3 "biologique" (activité/ passivité) : Les deux partenaires sont actifs.

c - La PERVERSION.

C'est le passage direct de la pulsion à l'extérieur du sujet. L'autre personne n'est pas perçue comme un sujet mais comme un objet. Une conduite perverse "dévie" par rapport à ces trois polarités. Elle implique une transgression et un passage à l'acte direct, sans compromis psychique. Elle n'est pas guérissable par la psychanalyse ; aujourd'hui elle est considérée comme étant plus proche de la psychose que de la névrose. Cf. Le problème actuel du "traitement" si difficile de la pédophilie.

Polarité n°1 : Objet - pas d'objet : Le sujet n'aime que lui-même : le narcissisme. / objets de même sexe que le sujet : l'homosexualité. (Ne fait plus partie du DSM = Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux) / objets non adultes = des enfants : la pédophilie. / objets non humains = des animaux : la zoophilie. / objets inertes = des objets (vêtements, bottines, poupées de cire ou gonflables) : le fétichisme. / objets morts = cadavres : la nécrophilie.

Polarité n°2 : Plaisir : Obtention du plaisir par le moyen du déplaisir : "souffrir pour jouir"- recherche de la douleur de l'autre : le sadisme./ recherche de sa propre douleur infligée par l'autre : le masochisme. / combinaison des deux : sadomasochisme.

Polarité n°3 : activité - passivité pure : le voyeurisme. / activité passive sujet qui a besoin d'être regardé dans ses ébats pour obtenir plaisir : l'exhibitionnisme. Il existe évidemment toutes sortes de combinatoires entre ces différentes perversions (pédophile/nécrophile/sadique...... Cf. Gilles de Rais.)

A.9 EVOLUTION "NORMALE" OU SOCIALISATION DE LA LIBIDO.

a) LE DÉSIR. Ce qui précède le désir, c'est le besoin (la pulsion) qui est une tension interne vers un objet adéquat. Le désir ressemble au besoin en ce qu'il est lui aussi une tension interne, mais il en diffère parce que le sujet se représente consciemment l'objet qui pourrait satisfaire sa pulsion. Le fait d'imaginer l'objet du désir, de nous le représenter sur un mode pseudo-hallucinatoire nous donne déjà un plaisir anticipé. Et l'on voit très bien ici l'ambiguïté du désir, c'est-à-dire comment il peut être à la fois une souffrance - liée à la tension et au manque - et un plaisir lié à l'anticipation de la satisfaction. Le choix de l'objet du désir est lié aux souvenirs des objets qui ont précédemment servi à satisfaire nos besoins ou pulsions. Et ces objets dépendent en grande partie du type de société dans laquelle vit le sujet, mais aussi du hasard des rencontres. Chaque société propose, pour chaque besoin, des modèles d'objet, par exemple l'image de la femme idéale "féminine", susceptible de déclencher le désir masculin, varie grandement d'un pays à l'autre et d'une époque à l'autre. Les jeunes filles d'aujourd'hui avec leurs jeans' et leurs énormes chaussures, auraient paru très peu séduisantes à des hommes du XIX° siècle. Autrement dit, ce n'est pas nous qui choisissons les objets de nos désirs, nous n'en sommes pas maîtres, ils nous sont imposés par le monde dans lequel nous vivons et sans le savoir, nous nous identifions à eux, au point de croire que nous sommes libres quand nous les réalisons. Les techniques de publicité font leur régal de notre naïveté et nous manipulent royalement par le biais de nos désirs. La grande idée de Freud est que nous n'avons quasiment aucune liberté dans la constitution de notre personnalité, de notre Moi et que c'est l'inconscient qui nous gouverne, donc qui est le maître.
" Le Moi n'est pas maître dans sa maison".

b) L'AMOUR. L'amour au sens général est un désir qui se porte sur un autre être, humain de préférence et qui aboutit au plaisir. Pour Freud, toute relation à l'autre est sous-tendue par l'anticipation du plaisir que l'on va recevoir de lui : plaisirs de toutes sortes, visuel, olfactif, esthétique, intellectuel, social, économique, mais essentiellement sexuel. Toute forme d'amour est égoïste et se fonde sur un manque. Même si le sujet accepte de souffrir un peu et de se priver pour faire plaisir à l'autre, il ne fait rien d'autre qu'obéir au "Principe de Réalité", mais il cherche finalement son intérêt personnel. Par ailleurs, c'est en fonction de notre passé, de nos amours d'enfance et des traces inconscientes qu'ils ont laissées, que nous choisissons nos amours d'adultes. Autrement dit, nous ne sommes pas libres, bien au contraire, nous sommes déterminés par notre passé dans nos choix affectifs les plus fondamentaux.

Freud distingue deux sortes d'amour :

- L'amour primaire, fondé sur une structure orale, et qui de ce fait désire "avaler", "incorporer" l'autre, le posséder totalement, d'où le phénomène de jalousie. (Cf. Othello)

- L'amour secondaire, fondé sur une structure génitale et qui se vit plus sur le mode de la communication ou de l'échange.
Conclusion : on aime toujours par rapport à soi même, par rapport à une image que l'on se fait de l'autre et qui est en relation avec un désir de l'enfance.

c) EVOLUTION PAROXYSTIQUE : LA PASSION. LA PASSION est le paroxysme du désir ou de l'amour. C'est un sentiment qui est devenu excessif, exclusif, tyrannique, polarisé sur un seul objet. Le sujet devient indifférent à la totalité du monde et même à soi-même. L'intensité de son énergie est décuplée, jusqu'à le conduire à des actions grandioses ou folles. Sa force est surhumaine. Pourtant Kant dit que la passion est une "maladie de l'âme", car, en réalité le sujet est passif, incapable de commander à sa passion. Il est sans prise sur elle, et elle le mène, comme s'il était aveugle, par le bout du nez. Il en est le prisonnier, pire, l'esclave. Elle le fait souffrir et pourtant éclaire tout son univers. La passion est une force "plus forte que le moi" ; elle réduit à néant notre volonté.Il existe toutes sortes de passions. Passion amoureuse, (Tristan et Yseult, Roméo et Juliette, Des Grieux et Manon... pour ne citer que les plus célèbres). Passion du jeu. Passion de la haine. Passion de l'avarice. Passion du pouvoir, l'ambition. Passion de la vérité, le dogmatisme fanatique. Remords. Etc. Freud explique la passion par un phénomène de projection massive. L'être aimé ou haï possède une caractéristique (silhouette, odeur, timbre de voix etc.) qui enclenche, à notre insu, tout un réseau complexe de réminiscences. Il fonctionne comme un "écran" grâce auquel nous extériorisons des émotions, sentiments, valeurs intenses, qui étaient profondément enfouis en nous-mêmes et donc inconscients. Nous "projetons" ces mêmes émotions, sentiments, valeurs... sur un être extérieur à nous, sans nous douter une seconde qu'ils viennent de nous. C'est ce qui peut expliquer, dans la passion, cette impression de reconnaître l'être aimé ou de le connaître depuis toujours. Donc, si dans la passion, nous ne percevons pas l'autre tel qu'il est réellement, nous sommes piégés par une illusion dont nous sommes les auteurs.Tout se passe comme dans le phénomène de la CRISTALLISATION si magnifiquement décrit par STENDHAL, De l'amour. Dans les mines de sel proches de SALZBOURG en Autriche (Salzbergwerk), le sel se dépose sur tout ce qui traîne dans la mine. Si bien que n'importe quel objet (lunettes, gobelet, soulier.....) se métamorphose en une œuvre d'art précieuse qui sous les projecteurs semble adamantine (en diamant).

d) MUTATION DE LA PULSION : LA SUBLIMATION. En chimie, la sublimation est la transformation d'un corps solide en gaz, c'est-à-dire en une substance légère, aérienne. En psychanalyse, la sublimation est la transformation, il faudrait dire ici la métamorphose, de la pulsion sexuelle (libido), en activités sociales valorisées, comme la création artistique, la vocation religieuse, les activités politiques, intellectuelles, sociales...Freud dit que le mécanisme de la sublimation est rare et mal connu, mais qu'il suppose une restriction de l'activité libidinale et une orientation de l'intérêt du sujet vers des buts non sexuels.

e) ROLE-CLEF de l'INTERDIT. On voit là, l'intérêt de l'interdit que FREUD pose comme absolument nécessaire non seulement à l'édification de la société, mais aussi à celle de l'individu, en particulier l'interdit de l'inceste. Mais Freud distingue radicalement l'interdit du tabou : LE TABOU est une défense irrationnelle, absolue, liée à la superstition, à la magie et au sacré. Il est accompagné de menaces de sanctions terribles, implacables, irréversibles, donc il est forcément générateur d'angoisse. Il est dangereux pour l'équilibre psychique. Il est déstructurant, aliénant et destructeur. Pour l'équilibre du psychisme, il faut éliminer les tabous, mais surtout pas les interdits. L'INTERDIT, au contraire selon Freud, est une défense rationnelle, une limite fonctionnelle, logique, dont l'utilité peut être expliquée, comprise, dont on peut prévoir les dangers de sa transgression. L'interdit est contrairement au tabou, structurant. Par exemple, au moment de l'adolescence, l'interdit porté sur la sexualité favorise une arborescence et une différenciation de la personnalité, donc un enrichissement. L'être humain et la société ne peuvent pas se construire sans le respect de LIMITES (Cf. dans la BIBLE, la notion d'interdit et en anthropologie l'interdit de l'inceste constitutif de la société).

B LA CURE PSYCHANALYTIQUE

L'hypnose ne guérit pas. Elle ne permet que de poser un diagnostic. Dès que le patient sort de son état hypnotique, il retombe dans son état initial. Pour "guérir" le patient des ses troubles, Freud invente une méthode dans laquelle le sujet est éveillé et conscient : c'est la cure analytique. Elle donne à la PAROLE un rôle capital et exige le respect de toute une série de règles : le protocole.

B.1. PROTOCOLE DE LA CURE FREUDIENNE (Analyse = psychanalyse / Analyste = psychanalyste / analysant = patient qui "fait" une cure psychanalytique)

a) - Qui est analysable ? - Freud pense que seul le névrosé est accessible au traitement psychanalytique. Le sujet psychotique est, selon lui, inaccessible au principe de réalité. - Âge se situant entre l'adolescence et la cinquantaine. Il faut avoir déjà une expérience de la vie et de la sexualité, mais il faut avoir aussi les moyens de "refaire" sa vie.- Personnalité ayant le goût de la sincérité, authentique, ayant le courage et la volonté d'affronter sa vérité, tâche qui est nécessairement difficile et douloureuse. - Assez bon quotient intellectuel. Il va falloir déchiffrer les ruses subtiles du langage de l'INCONSCIENT.- Temps disponible (pas de virgule) et argent. A l'époque de Freud, la cure est payante.

b) - Où ? - Dans le "cabinet de l'analyste". L'analysant est allongé sur un divan. Le psychanalyste est assis derrière lui. L'analysant ne voit pas son analyste, c'est important, il peut "projeter".

c) - A quel rythme ? Trois séances de 45 minutes par semaine, plusieurs années de suite. Une analyse peut durer 4, 5, voire 10 ans ! Certaines analyses sont interminables.

d) - Quel prix ? Le montant de la séance se négocie avec l'analyste, en fonction des revenus de l'analysant. Il est souvent assez élevé. Toute séance est due même si l'analysant ne s'y rend pas, car le psychanalyste, lui, a bloqué son temps et est présent pour son patient, pendant toute la durée normale de la séance.

e) - Les consignes à respecter ? 1 - DIRE tout ce qui vient à l'esprit, parler, même si le contenu ne semble pas avoir de rapport avec le sujet, même si c'est obscène ou scabreux, ou agressif et insultant envers l'analyste. Raconter ses rêves, ses actes manqués, ses symptômes, ses inquiétudes, les détails de sa vie... 2 - Ne pas passer à l'acte pendant la séance. 3 - Ne rien changer, volontairement, dans son existence pendant la durée de la cure : ne pas divorcer, ou se marier, ou déménager... sauf si nécessaire.

B.2. LE TRANSFERT. C'est le fait, pour l'analysant, de déplacer, sans s'en rendre compte, ses fantasmes, et les sentiments qu'il éprouvait pour ses proches en les projetant sur son analyste ; peur, amour, désir, agressivité, culpabilité... Dans le transfert, l'analysant vit une "répétition, vis à vis de l'analyste, d'attitudes émotionnelles inconscientes, amicales, hostiles ou ambivalentes que le sujet a établies dans son enfance au contact de ses parents et des personnes de son entourage" D. Lagache. Cf. LE DEPLACEMENT ET LA CONDENSATION, du processus primaire. C'est la raison pour laquelle l'analysant ne doit rien savoir de son analyste ni même le voir. Cette NEUTRALITE "bienveillante" rend possible le phénomène de la projection ou encore du transfert. L'analyste est silencieux, il ne juge pas, il ÉCOUTE, d'une manière très particulière, sans aucun jugement, avec son "attention flottante" et sa "troisième oreille". Il entend "tout", enfin théoriquement, tout ce que l'analysant dit sans savoir ce qu'il dit. Son attention se fixe sur les lapsus, les "creux" du langage, les répétitions les déraillements de sens et de mots. Il repère et répète les mots stratégiques, c'est-à-dire les mots-clefs dans lesquels se nouent des sens multiples et qui sont des carrefours de significations, bref, il insiste sur ces mots surdéterminés et les renvoie à l'analysant en les répétant tout simplement. Par exemple s'il s'agissait de "l'Homme au Loups", "Vous avez dit votre père … oui, le loup....") Il essaie de fonctionner comme un miroir non déformant, contrairement aux autres êtres que nous côtoyons.

B.3. - LA RESISTANCE. En réalité, tout analysant, comme Œdipe, est incapable de voir, d'entendre ou de comprendre ce que lui dit son inconscient, que son analyste lui reflète. Il est atteint de cécité psychique et par conséquent, il élabore toutes sortes de stratégies pour refuser sa vérité. Il se défend. Ses résistances se traduisent par :

a) - l'agressivité ou la colère.

b) - La répression : poser de multiples interdits à soi-même, à ses proches ou à tout le monde.

c) - Le déni ou la dénégation, c'est-à-dire le fait de nier catégoriquement sans discussion.

d) - la justification par la rationalisation, fabriquer de grandes et longues théories pour prouver que l'on a raison.

e) - Le rire, la moquerie, le sarcasme, le fait de ridiculiser l'autre ou un sujet particulier.

Lorsque ce qui était inconscient, donc pathogène, est devenu conscient, c'est-à-dire réinvesti, réorganisé, compris, construit, réaménagé par la conscience grâce au langage, alors les troubles disparaissent d'eux-mêmes. L'inconscient est libéré de son contenu, donc de sa force invisible, et enfin, le sujet n'est plus sous son emprise. Seule la remémoration de l'histoire consciente du sujet (ou anamnèse ou réminiscence) peut mettre fin à la répétition.

Les critères de la "guérison" selon Freud sont :

- Le passage à l'acte réussi : réalisation facile du désir ou du projet, satisfaction et plaisir.

- L'acquisition de la normalité :"Aimer et travailler", c'est être normal, pense Freud. L'amour hétérosexuel et le travail sont les deux activités les plus indispensables à la survie de la société.

B.5. La formation du psychanalyste. Tout psychanalyste doit avoir été formé. Cette formation se fait, chez les Freudiens, en quatre temps. Le futur psychanalyste doit :

1 – Faire une analyse thérapeutique personnelle normale. Il comprendra peut-être que son désir de comprendre les autres était fondé sur la peur et le désir inconscient de se comprendre lui-même.

2 – suivre une formation théorique : lectures, cours, participation à des séminaires, conférences...

3 – faire une analyse didactique. Il commence à prendre un "patient" en analyse, mais il doit se rendre régulièrement chez un "didacticien", une sorte de "professeur" de psychanalyse, et se mettre en position d'analysant pour analyser la manière dont il fonctionne quand il est analyste. Il doit apprendre à maîtriser le transfert de son analysant sans faire de contre-transfert, c'est-à-dire sans projeter ses propres sentiments ou valeurs sur son "patient", ce qui est le plus difficile.

4 - Le contrôle : à la fin de son cursus, il se rend successivement chez trois "didacticiens", qui "l'examinent", lui posent des questions qui peuvent être déroutantes ou provocatrices, afin de voir "où" il en est dans sa propre relation avec son inconscient et s'il est habilité à prendre en analyse des patients.Il faut souligner que Freud n'a jamais été psychanalysé et n'a pas fait de didactique pour la raison évidente qu'il était le premier.

B.6. LES FAUSSES ANALYSES

- l'analyse sauvage. S'amuser à jouer les psychanalystes sous le prétexte qu'on a lu des livres et compris ou cru comprendre la théorie psychanalytique est une pratique très dangereuse parce que l'on ne sait pas maîtriser le transfert (la peur, l'amour ou la haine nécessairement projetés sur soi), ni le contre-transfert. C'est le gâchis assuré dans une amitié.

- L'auto-analyse L'introspection, l'interprétation de ses propres rêves. Elle est valable jusqu'à un certain point, mais ne peut pas aller très loin. Le sujet n'a pas le moyen de faire le transfert, qui est lui-même un outil essentiel de l'analyse, et il est incapable de déjouer tout seul les processus de défense, élaborés par la résistance, qui aveuglent nécessairement sa sincérité. Intellectualiser ses problèmes, ce n'est pas les résoudre.

C LA PSYCHANALYSE : PHENOMENE CULTUREL.

Si la découverte de la psychanalyse a d'abord été jugée comme trop révolutionnaire et comme scandaleuse, elle a eu, cependant, de grandes conséquences sur notre civilisation. Son regard décapant sur le moi-souterrain labyrinthique a remis en question toute une série de certitudes et de comportements de la société. La "raison consciente" apparaît comme une bien fragile écorce.Les "soupçons" de Freud se portent sur :

C.1 LES IDEOLOGIES DE LA VERITE

a) La religion

Pour Freud elle est, par excellence, le lieu de l'illusion. L'illusion est définie par Freud comme le fait de croire que l'objet de son propre désir existe réellement à l'extérieur de soi. Freud est athée.La religion est la projection de désirs frustrés.Dieu est l'image du père idéal tout puissant.La religion est une névrose collective qui à la fois engendre l'angoisse, et en même temps la gère au moyen de ses propres rituels. (Voir le cours sur la RELIGION.)

b) La philosophie

Idem : les différents systèmes sont des projections des désirs humains non satisfaits.

c) La science

Bachelard, épistémologue ayant lu Freud, met en évidence le rôle de l'inconscient dans l'évolution de la science. L'inconscient produit des "obstacles épistémologiques" qui freinent son évolution. (Voir, plus tard, dans le cours d'épistémologie l'explication psychanalytique de "l'explosion au cours de chimie" par Bachelard.)Importance des pulsions qui orientent le cours de la science... Cf. : la THANATOCRATIE : règne de la pulsion de mort à l'intérieur du progrès scientifique et technique.

C.2 LE DOMAINE DE L'ESTHETIQUE

La création esthétique s'explique en partie par la sublimation. Elle est considérée comme un acte réussi, équivalent à une guérison. Il y a un lien entre le contenu de l'œuvre d'art et la névrose de l'artiste. L'œuvre d'art est en effet le lieu privilégié où s'expriment les fantasmes, les désirs, les symptômes... de l'artiste.Cf. l'étude de Léonard de Vinci et du "vautour" représenté dans les plis de la robe de Sainte Anne. Ce vautour traduirait son hermaphrodisme. La théorie de Freud n'explique pas le plus important dans l'œuvre d'art : sa beauté.

C.3 LE DOMAINE DE LA MORALE

a) La liberté est une illusion. Il existe un déterminisme psychique qui est cause de tous nos comportements, les explique et par conséquent les excuse. D'où la banalisation de la responsabilité individuelle et la revendication de "circonstances atténuantes" dans tous les cas de figure. Responsabilité de la société et du milieu.

b) Le bien et le mal en soi n'existent pas, ce sont des valeurs engendrées par la société pour garantir son équilibre son bon fonctionnement. Les valeurs morales deviennent donc des valeurs sociales, que Freud traite comme des valeurs "économiques" puisque leur fonction consiste à canaliser les pulsions pour rendre possible le travail. D'où l'effondrement de la morale.

c) L'inhibition des désirs dans le tabou est préjudiciable à l'équilibre de l'individu. La théorie de Freud a été entendue, à tort, comme une invite à une libéralisation des mœurs et à la suppression des interdits. D'où la disparition des interdits (Cf. dans les années 60, la pédagogie du Dr Spock prônant un laxisme total dans l'éducation des enfants aux US et la "liberté" des années post-freudiennes en mai 68 où il était "interdit d'interdire").Freud conseillait la suppression des tabous, mais absolument pas celle des interdits ! Il a été mal entendu. Et lui qui connaissait bien l'être humain savait l'usage que l'on pourrait faire de la psychanalyse mal comprise. C'est bien là le sens du : "Je vous apporte la peste"...

C.4 DOMAINES POLITIQUE ET SOCIAL

1) Mise en évidence par Freud de l'égoïsme fondamental et universel des êtres humains. L'homme n'est pas "bon" naturellement, au contraire, il a spontanément envie de profiter de son "prochain", de l'exploiter, de le faire souffrir pour son propre plaisir. Une névrose collective infantilise le peuple et le rend fragile politiquement parce qu'il est facilement manipulable par le biais de ses fantasmes.

2) Mise en évidence de la névrose politique. L'ambition et la quête du pouvoir comme compensation ou système de défense. (Cf. l'analyse du cas d'Hitler par G. Mendel)

3) Pessimisme de Freud par rapport aux idéologies politiques en général. Pour changer de société, il ne sert à rien de changer de régime, mais il faudrait que les hommes "travaillent" sur leur inconscient, pour faire évoluer réellement leur comportement. Peu d'individus sont prêts à faire cette démarche.

CONCLUSION

Freud nous dit que l'être humain est un être de conflit. La vie est un système d'interrelations. Et comme les Existentialistes, il pense que chaque homme est le résultat de son histoire.

Freud dit que la psychanalyse a fait subir à l'humanité sa troisième humiliation.

a) La première humiliation est cosmologique. Copernic et Galilée nous révèlent que nous ne sommes pas au centre du monde.

b) La deuxième humiliation est biologique. Darwin nous apprend que nous ne sommes pas des créatures créées par Dieu, mais que nous descendons de l'animal et que nous sommes "cousins" des singes.

c) La troisième humiliation est psychologique. Freud découvre que l'homme n'est pas son propre maître ; il est dominé et manipulé par des forces inconscientes et aliénantes qui le privent de sa lucidité et de sa liberté.

FREUD est considéré, après NIETZSCHE et MARX, comme le troisième "Maître du soupçon". (Cf. Paul Ricoeur)

Apparemment les constats de la psychanalyse sont négatifs : Nous sommes névrosés, piégés par nos illusions, égoïstes, pas libres, les produits de la civilisation et de notre éducation... Mais ce ne sont que des diagnostics. Une libération est possible.En réalité, la psychanalyse apporte à l'humanité de nouvelles solutions et de nouvelles promesses. En affirmant que l'être humain est déterminé, elle lui offre une liberté possible. En effet, il ne faut pas confondre DETERMINISME et DESTIN.

1 - La notion de destin (ou de fatalité) affirme que toutes nos actions et tous les événements de notre vie ont été décidés et fixés par des puissances surnaturelles. Cf. Œdipe : il lui est impossible de changer une "virgule" à son existence. Cf. les malédictions de Dieu dans la Bible : "Tu mourras"... La fatalité nie absolument la liberté de l'homme.

2 – Au contraire, la notion de déterminisme reconnaît, qu'il existe des causes à nos comportements. Ces causes ne sont pas fixées de toute éternité, elles ont une histoire et l'on a prise sur elles. Pour Freud, les causes qui ont fabriqué notre névrose, ne sont pas dans un univers surnaturel inaccessible mais à l'intérieur de nous-mêmes et donc, nous pouvons "agir" sur elles et les modifier en leur "injectant" de la conscience, c'est-à-dire en les rendant conscientes par la réminiscence et par la parole. " La conscience n'est pas donnée, elle est une tâche. " Freud. En effet, de même que la compréhension des lois physiques de l'univers nous donne un pouvoir sur le monde et nous ouvre à une liberté "matérielle" plus grande, la compréhension des lois du psychisme, et l'effort pour sortir des illusions et accéder à plus de lucidité, peuvent nous libérer de notre dépendance à l'égard de nos comportements infantiles, égoïstes, archaïques et nous offrir une belle liberté intérieure.

La psychanalyse permet alors selon Freud de :

1 - conseiller 2 - éduquer3 - "guérir" (devenir normal)

Les théories de Freud ont été soit dogmatisées, soit dénigrées. Il a eu beaucoup "d'adorateurs" qui ont sacralisé ses paroles, mais aussi beaucoup d'ennemis qui ont dénoncé ses "erreurs" ou en tout cas des points avec lesquels ils n'étaient pas d'accord. Néanmoins, ce qui fait l'accord unanime des psychanalystes, c'est l'existence de l'inconscient, de son type particulier de fonctionnement et de ses codes. Sur ce plan Freud n'est pas "dépassé".

En revanche les hypothèses freudiennes sur la sexualité et son rôle dans le psychisme sont, non pas "dépassées", mais elles ont été fort contestées par ses nombreux successeurs qui ont proposé des théories très différentes et parfois originales. La plupart des psychanalystes-femmes ne se sont pas reconnues dans la théorie freudienne de la sexualité féminine.

A la fin de sa vie Freud s'est montré très prudent sur ses propres théories.

1 - " La femme est un continent noir" : une "région" non explorée, donc inconnue. " A la femme, je n'ai rien compris".

2 - " Je n'ai fait que poser des hypothèses".

3 - " L'ignorance est l'ignorance, nul droit à croire quelque chose n'en saurait dériver." Mais bien peu de ses continuateurs ont su tenir compte de ses réserves.

2. JUNG

JUNG (Carl Gustav) (1875-1961).Sa biographie montre déjà de grandes différences avec celle de Freud :

1 - Né en Suisse dans un petit village. Milieu rural paysan. (Freud citadin)

2 - Famille protestante, père pasteur. Jung est croyant. (Freud est juif et athée)

3 - Pauvre. Jung obtient une bourse pour étudier à Bâle. (Freud issu de famille aisée)

4 - Très vaste culture extra européenne : Philosophie kantienne, bouddhisme. Histoire des religions. Ethnologie. Études des Mythologie - Inde, Extrême-Orient, Egypte, Afrique – Ésotérisme : alchimie, astrologie, Yi-King, Tarot … (Freud : culture littéraire classique européenne)

5 - Etudes de médecine, puis de psychiatrie. (Freud est neurologue).

6 - Rencontre avec Freud, en 1907, grande amitié. Freud voit en Jung son "fils spirituel".

7 - Rupture en 1911. Jung refuse le dogme freudien de l'étiologie sexuelle des névroses. L'être humain est connecté à une énergie infiniment plus vaste que celle de sa libido.

Les enjeux du conflit avec Freud :

- Jung est d'accord avec Freud sur : La théorie de l'inconscient, son fonctionnement, ses manifestations, l'importance de la réminiscence, le complexe d'Œdipe...

- Jung est en désaccord avec Freud sur :

1. La conception de l'être humain. Alors que Freud réduit l'être humain à son ego et à sa sexualité, Jung l'aborde dans sa multidimensionnalité, sa totalité ; sa relation à l'univers et au surnaturel. Freud fonde tout le fonctionnement du psychisme exclusivement sur la sexualité. Jung pense que nous sommes reliés à une énergie beaucoup plus vaste, cosmique, qui dépasse et englobe, à titre de composante, la sexualité. Cf. ce que les Orientaux nomment "Kundalini".

2. La nature de l'inconscient. Freud explore un inconscient personnel constitué par le refoulement, Jung s'intéresse à un inconscient collectif, universel, beaucoup plus vaste, à la fois infra et supra-conscient (dont le refoulement freudien ne constitue qu'une strate). La strate la plus essentielle, est reliée aux archétypes universels et atemporels . Notre inconscient contient, a priori, des constellations de noyaux énergétiques et structurants.

3. La finalité de l'analyse. La finalité de l'analyse pour Freud est l'acquisition de la normalité. Pour Jung elle vise le dépassement de l'ego dans le processus d'individuation.

Théorie de Jung

Jung n'a pas proposé de "topique" du psychisme. Il n'a pas théorisé son travail. Ses découvertes psychanalytiques sont dispersées dans ses différents ouvrages. En revanche pour la psychologie, il a proposé un classement typologique fondé sur une combinatoire de caractères : Extraversion, Introversion, Pensée, Intuition, Sentiment, Sensation.

1. L'inconscient est un réservoir d'ARCHÉTYPES

Les ARCHETYPES sont définis par Jung comme des sortes d'engrammes, des moules, des patterns, des schèmes dynamiques, formés "d'images-formes-affects" - qui font penser aux "Idées" platoniciennes - contribuant à exprimer d'une manière structurée et qualitative les différentes énergies qui nous habitent. Ils sont universels. Ils servent à fabriquer, à donner "corps" aux symboles et à toutes les images que nous trouvons dans les rêves, les mythes, les fantasmes, les œuvres d'art, les religions.

Voici quelques exemples d'archétypes repérés par Jung : le double, l'ombre, le père, la mère, la grande mère, l'eau, le feu, le soleil, le serpent, l'enfant éternel, l'imago dei, (image de Dieu), le diable, le dragon, la caverne, le labyrinthe, le passeur, l'archange, etc. Lire L'Homme et ses Symboles. Jung.

Deux archétypes sont particulièrement essentiels dans notre construction psychique, le masculin et le féminin : l'animus et l'anima.

L'animus est l'archétype de la virilité, il est la personnification des composantes viriles inconscientes chez la femme. (Yang ou énergie émettrice, action, volonté, extériorisation, rationalité, structure …)

L'anima est la personnification des composantes féminines inconscientes (Ying ou énergie réceptrice, statique, intuition, intériorité, imagination, fluidité …) chez l'homme et définit son type de femme, en se combinant avec les éléments de son histoire personnelle et ceux du type de société dans laquelle il vit. Nous ne pouvons pas voir ou nous représenter directement un archétype parce qu'il n'est pas conscient, mais nous pouvons le reconnaître au travers de ce qu'il produit de commun dans tous les symboles ou images de la virilité et de la féminité. Pourtant, les images de l'homme et de la femme ont infiniment varié à travers les âges et les civilisations, on le voit bien dans les représentations artistiques... L'animus et l'anima sont leurs "plus petits dénominateurs communs", la "forge" centrale d'où émergent toutes les constellations d'images et de symboles.

Ces archétypes sont très importants, car ils sont les vecteurs dynamiques qui nous font entrer dans des rapports privilégiés avec des êtres particuliers ou des situations particulières. Par exemple un homme ne se sent attiré que par des femmes qui correspondent à son type de femme, c'est-à-dire à son archétype anima. C'est pareil pour la femme, elle choisit un homme en fonction de son animus (son archétype de la virilité). Les archétypes orientent et organisent nos productions et nos rencontres avec le monde et les autres. Il semble que Jung ait eu une conception spiritualiste d'un inconscient nouménal (qui existe en soi), mais il reste très silencieux sur l'origine de ces archétypes et sur leur statut ontologique. Sont-ils les reflets de l'univers réel, c'est-à-dire d'existences réelles à l'extérieur de nous et fonctionnent-ils comme des "ponts", nous reliant avec elles ? Ou bien sont-ils des formes "transcendantales", c'est à dire liées à la structure du psychisme, sans signifier rien d'autre que lui-même ? Jung est resté dans la sphère de la psychologie. Officieusement il a exprimé sa foi en une transcendance, mais il n'a pas officiellement pris de position métaphysique.

2. Le rêve est un MESSAGE envoyé au rêveur.

Jung n'est pas d'accord avec la démarche réductrice de Freud qui ne voit dans les rêves que des signes de symptômes et les expressions des désirs sexuels cachés.Pour Jung, il y a des rêves personnels qui expriment ces désirs et de grands rêves symboliques universels. Il y a des rêves anticipatoires et des rêves compensateurs. Par exemple un rêve de toute puissance prévient le rêveur qu'il est en train de subir trop passivement une situation infantile. Le rêve peut exprimer des conflits ou des désirs, mais il signifie toujours plus, il est constructif et oriente le rêveur vers un sens. En effet selon Jung, l'inconscient trie et réorganise les images et symboles d'une manière infiniment plus intelligente et perspicace que l'intelligence consciente. Il envoie au rêveur des informations utiles pour son équilibre psychique, son développement et son évolution future, bref sur la manière la plus adéquate de conduire sa vie. Les rêves, si l'on sait les décrypter, contiennent tous des messages qui permettent de faire le point sur la situation présente, de se réorienter, de construire le mieux possible sa personnalité donc de progresser. L'inconscient se comporte comme un grand sage caché en nous et plein d'humour. Le rêve traduit une énergie intérieure qui reprogramme les informations qu'elle reçoit.L'interprétation jungienne du rêve ne nécessite pas les associations personnelles du rêveur mais bien plutôt la connaissance et l'utilisation des symboles, des archétypes, des matériaux historiques qui s'y rapportent. Cette opération est appelée "amplification".

3. "L'individuation" ou la rencontre avec le "SOI"

Loin d'attribuer comme seule finalité de la cure analytique la normalisation c'est-à-dire l'alignement de la conduite sur celle du plus grand nombre comme le préconise Freud, Jung pense que la finalité de la cure analytique est, certes la disparition des troubles, mais pas seulement. Elle permet de recentrer le sujet, non pas sur son petit "moi" désirant, mais sur ce qui fait l'unicité, l'originalité et la valeur la plus fondamentale du sujet : son individuation, son "SOI". Le SOI est la totalité organisée, cohérente, harmonieuse, des différentes énergies – ou différentes tendances du sujet -, une synthèse dynamique, particulière à chacun, qui est son point d'équilibre et de réalisation maximale en bref sa personnalité originale supérieure.

4. Théorie de la synchronicité.

La frontière entre le monde réel et le monde intérieur est bien ténue. Nos inconscients sont "branchés" à la fois sur le monde physique, comme dans une sorte de nappe phréatique commune, et sur une "banque de données" immense. Ils sont tous reliés entre eux. Des informations de toutes sortes circulent dans tous les sens et dans certains cas elles se manifestent en défiant les lois du temps et de l'espace : prophéties, rêves prémonitoires, coïncidences, visions à distance, médiumnité... La synchronicité pose l'existence de relations acausales (elles sont inexplicables par la logique). Jung s'est intéressé aux études, menées en Angleterre et aux USA, sur l'ESP (Extra-Sensory-Perception), aux coïncidences, faits qui se regroupent à certains moments et qui ont entre eux une cohérence analogique : si, au moment où j'éternue, il se produit un tremblement de terre, c'est un HASARD. Mais si, dans une librairie, je me trompe de paquet à la caisse et qu'en arrivant chez moi je découvre que j'ai justement emporté le livre dont j'ai rêvé la veille, c'est une COÏNCIDENCE. Selon Jung, le même archétype se manifeste simultanément à l'intérieur et à l'extérieur de moi. "Il se pourrait que la psyché et la matière soit un même phénomène, observé respectivement de l'intérieur et de l'extérieur". Jung, l'Homme et ses Symboles. Jung a étudié la conception chinoise des coïncidences, exprimée dans le YI-KING. A partir des figures formées par des jets de baguettes ou de pièces, les Chinois trouvent des significations et des réponses aux problèmes présents du sujet. Ce que l'inconscient projette à l'extérieur dans l'aléatoire (dans l'apparent désordre du "hasard"), c'est en réalité son ordre propre, l'état présent de ses énergies intérieures. En somme, le désordre apparent que j'ai semé, reflète l'ordre complexe de ma cohérence interne. L'idée de base, c'est que finalement, la découpe que nous opérons dans le réel, est le reflet de notre monde archétypal. Nous sommes ce qui nous arrive. Ou encore, il ne nous arrive rien qui ne soit déjà inscrit en nous.

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LES AUTRES SUCCESSEURS DE FREUD.

Ils sont trop nombreux pour faire l'objet de notre étude ici. En voici cependant quelques-uns.

1 ADLER. Autrichien (1870-1937)

Il minimise la libido. La vie psychique s'élabore à partir du sentiment d'infériorité du petit enfant. La personnalité est fabriquée par tout un système de compensation, fondé sur le désir de puissance.

2 GRODDECK. Allemand (1866-1934). Médecin de campagne, généraliste, il a le temps de dialoguer avec ses patients. Il remarque que la localisation physique des symptômes est presque toujours en rapport avec un type de souffrance psychique. Le corps exprime le ça. Il est contemporain de Freud et lui communique ses observations. Il est le premier "psycho-somaticien".

3 Otto RANK. Autrichien (1884-1939) Insiste particulièrement sur le "traumatisme de la naissance", dans lequel il voit le prototype de toute forme d'angoisse.

4 Mélanie KLEIN. Autrichienne (1882-1960) Contrairement à Freud elle pratique la psychanalyse d'enfants. Au lieu d'utiliser la parole, elle utilise des jeux qui permettent de manipuler des symboles, des images, des dessins. Elle insiste sur les mécanismes d'introjection et de projection.

5 Wilhelm REICH. Autrichien (1897-1957) Très original, car à la fois communiste et psychanalyste. Les deux étant inconciliables, il est à la fois exclu du P.C. et exclu de l'Association de Psychanalyse ! Il pense que THANATOS, n'existe pas. C'est la répression d'EROS qui fabrique la pulsion de mort. La répression de la sexualité crée le refoulement la frigidité, l'impuissance. Ces troubles sont les causes d'une rigidité physique et psychique : la "cuirasse caractérielle". Cela engendre le fascisme... La solution : le refus de tous les interdits sexuels, l'amour libre, la suppression du mariage, de la famille, et la construction de vastes communautés avec des crèches pour y élever tous les enfants qui naîtront des multiples unions libres. Suppression de l'Etat aussi en passant. Il part aux USA. Il élabore sa théorie de "l'orgone", qui serait une substance présente dans l'univers, de même nature que l'énergie qui se dégage dans l'expérience de l'orgasme. Il fabrique des "capteurs d'orgone" et propose à tous les gens qui ont des troubles sexuels, des séances de sexo-thérapie dans des cabines diffusant de l'orgone, spécialement efficace pour supprimer la cuirasse caractérielle !!! Il s'est retrouvé condamné pour escroquerie ! et enfermé dans un pénitencier où il est mort.

6. LACAN. Français (1901-1981) Psychiatre de formation, il devient un psychanalyste célèbre. Il affirme pratiquer un retour à ce qui est essentiel dans la théorie freudienne. Sa propre théorie est déroutante et a été controversée. Son langage ésotérique, à la syntaxe étrange, est incompréhensible aux non initiés, et même à de nombreux initiés… Lacan a été exclu de l'Association Internationale de Psychanalyse. En 1964, il fonde sa propre école de psychanalyse, l'Ecole Freudienne, qu'il dissout en 1980 pour fonder La Cause Freudienne. Lacan articule son analyse de l'inconscient autour de trois concepts : l'imaginaire, le symbolique, et le réel.

L'imaginaire est la synthèse illusoire et narcissique que nous fabriquons sur notre identité. Lacan part de l'exemple du stade du miroir. L'enfant placé devant un miroir jubile et réagit par une série de mimiques. Peu à peu, vers l'âge de dix-huit mois, il a construit et identifié son moi à cette image. Le moi est donc le résultat de la conquête d'une image virtuelle, illusoire et incomplète de soi. La réalité de notre moi nous échappe. Ce que nous appelons l'autre résulte du même processus, l'autre est imaginaire. Or nous croyons, toujours à tort, que l'autre possède ce qui nous manque. Donc la relation à l'autre est imaginaire.

Le symbolique, c'est le signifiant en général, c'est-à-dire tout ce qui fonctionne comme langage. C'est l'ensemble de tous les codes qui nous préexistent et qui nous traversent de part en part. Tout notre être est "pris" par le symbolique. "L'inconscient est structuré comme un langage", écrit Lacan. Le symbolique est "décentré" par rapport au réel, il tente de signifié un monde qui lui échappe nécessairement.

Le réel est ce qui est à l'extérieur de l'imaginaire et qui résiste à tout langage. Il est inaccessible, ce que Lacan traduit par : "Le réel est impossible".

La psychanalyse doit aider le sujet à se comprendre, c'est-à-dire passer de l'imaginaire au symbolique. C'est uniquement par le langage que le "ça" peut accéder au "je".

SUCCESSEURS CONTEMPORAINS

Liste non exhaustive :USA : SPITZ, ERIKSON. B.BETTELHEIM G.B : WINNICOTT. LAING et COOPER (antipsychiatrie). RFA : MARCUSE. FRANCE: LACAN. A.GREEN. S.LECLAIRE. DELEUZE et GUATTARI (refus de la norme) M.MANONI. F. DOLTO etc.

3. Informations pratiques

RENSEIGNEMENTS PRATIQUES SUR L'INSTITUTION.

Voici quelques-uns uns des endroits où l'on peut obtenir les noms et les adresses de psychanalystes.

1 ASSOCIATION INTERNATIONALE DE PSYCHANALYSE 24 Place Dauphine. 75006 PARIS.

2 INSTITUT DE PSYCHANALYSE (tendance freudienne) 187 rue St Jacques. 75005 PARIS.

3 SOCIETE FRANCAISE DE PSYCHANALYSE (tendance jungienne) 1 Place de l'Ecole militaire. 75007 PARIS.

4 ECOLE FREUDIENNE (tendance lacanienne) 69 rue Cl Bernard. 75006.5 QUATRIEME GROUPE. etc...

IL EXISTE QUELQUES CENTRES MEDICO-PSYCHOLOGIQUES DANS LA REGION. Ils sont CONVENTIONNES, et proposent un personnel COMPETENT.

A PARIS

- Le B.A.P.U. (Bureau d'Aide Psychologique Universitaire) Spécialisé pour les jeunes étudiants. 30 rue Pascal. 75005 tél. 01 43 31 31 32.

- IMM (Instititut Médical Montsouris) (Consultation externe, pour adolescents et universitaires.)Service Jamet . 42 Bd Jourdan. 75014. Tél. 01 56 61 62 63

- Le centre CLAPAREDE. Rue du Général Cordonnier. 92.200 Neuilly. Tél.01 47 45 23 70

Il existe d'autres adresses

Généalogie freudienne

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